Le silence était lourd dans le gymnase dévasté.
Le sol était fissuré, les gradins éventrés, et la poussière retombait doucement comme de la neige grise.
Ren, encore assis contre le mur, tentait de calmer sa respiration.
Ses veines n'étaient plus sombres, son bras avait retrouvé une apparence normale.
Mais il tremblait toujours.
Hana, légèrement blessée, se tenait à quelques pas de lui.
Sa jambe droite boitait, mais son regard restait concentré et vigilant.
— Hana… dit Ren d'une voix rauque.
Pourquoi tu ne m'as jamais parlé de ce groupe ?
Pourquoi maintenant ?
Elle ferma les yeux un instant, comme pour rassembler son courage.
— Parce que je voulais d'abord te comprendre… et t'évaluer.
Savoir si tu étais un danger ou une possibilité.
Ren fronça les sourcils.
— Une possibilité pour quoi ?
Hana leva alors le regard vers le trou béant du toit.
La lune éclairait son visage pâle.
— Pour changer le destin de ceux comme nous.
Ren resta silencieux, perplexe.
Hana inspira profondément.
— Ren… il existe trois types d'Astra dans notre monde.
Les Lunaires, comme moi.
Les Solaires, guidés par la lumière pure.
Et les Chaotiques… comme toi.
Ren déglutit difficilement.
— Donc il y en a d'autres… comme moi ?
Hana secoua la tête.
— Non. Pas exactement.
Les Chaotiques sont extrêmement rares… et extrêmement instables.
Ils détruisent leur hôte. Ils tuent tout autour d'eux.
Tu es le premier… à ne pas avoir explosé dès la première manifestation.
Ren sentit un frisson glacé.
— Super… je suis un miracle vivant ou une bombe ambulante, c'est ça ?
Elle lui offrit un sourire doux malgré la situation.
— Peut-être les deux. Mais au moins… tu es encore toi.
Ren détourna les yeux.
— Pas sûr.
Hana reprit son sérieux.
— L'Ordre d'Onyx, eux, ne voient pas ça comme moi.
Ils pensent que les Astra sont des armes.
Et les Chaotiques…
Des forces absolues.
Ren se redressa légèrement.
— Alors ils veulent me capturer ?
— Pas seulement. Ils veulent t'étudier. Te briser.
Te modeler pour créer un soldat parfait.
Ren sentit la colère monter.
— Et toi ?
Pourquoi tu m'aides, toi ?
Elle s'accroupit devant lui, son visage proche du sien.
— Parce que tu n'es pas une arme, Ren.
Tu es un adolescent.
Tu ne mérites pas de porter ça seul.
Ren la regarda quelques secondes…
et sentit une chaleur étrange dans sa poitrine.
— Merci… Hana.
Elle détourna le regard, légèrement gênée.
Puis son expression changea brusquement.
— Ren.
— Hmm ?
Elle écarquilla les yeux.
— On n'est plus seuls.
Ren se figea.
Un craquement se fit entendre dans l'ombre derrière le panier de basket.
Puis un pas.
Un deuxième.
Une silhouette masculine émergea de l'obscurité.
Ren sentit son sang se glacer.
Un homme d'environ trente ans, grand, vêtu d'un long manteau noir, les mains dans les poches.
Ses cheveux sombres étaient coiffés en arrière, et ses yeux brillaient comme deux éclats métalliques.
Il souriait.
Un sourire calme… mais terrifiant.
— Bonsoir, enfants.
Hana se leva immédiatement, élevant une mince barrière lumineuse, malgré sa douleur.
— Ne t'approche pas de lui ! cria-t-elle.
L'homme pencha la tête.
— Hana Yukishiro…
La dernière héritière du Croissant d'Argent.
Toujours aussi dramatique.
Hana sentit sa gorge se serrer.
Ren fronça les sourcils.
— Tu… tu le connais ?
Elle hocha la tête.
— Karas Onyx.
Le Chasseur Noir.
L'homme s'inclina légèrement, amusé.
— Enchanté, Ren.
Ren recula.
— Comment tu connais mon nom ?
Karas sourit encore plus.
— Je suis venu pour toi.
Ça fait longtemps que nous t'attendons.
Ren sentit la colère monter.
— Je ne viens nulle part avec toi !
Karas avança d'un pas.
Le sol se fissura sous son pied comme si son corps était trop lourd.
— Tu n'as pas le choix, garçon.
Le Chaos chaotique… t'appartient à peine.
Tu survivras quelques semaines au mieux.
Peut-être moins.
Ren serra les dents.
— Je survivrai sans vous !
Karas lança un regard froid.
— Ah bon ?
Alors montre-moi.
Il fit un geste de la main.
L'air vibra.
Un impact invisible frappa Ren, le projetant contre un mur.
— REN ! hurla Hana.
Elle lança une lame lunaire.
Karas l'arrêta entre deux doigts. Elle se mit à crépiter avant de se dissiper comme de la vapeur.
— Tu t'es améliorée, Hana.
Mais tu n'es pas prête.
Hana trembla de rage.
— Je ne te laisserai PAS l'emmener !
Karas soupira.
— Ce n'est pas toi qui décides.
Il s'élança en un éclair, trop rapide pour Ren.
Hana tenta de bloquer, mais Karas la frappa d'un revers du bras.
Elle s'écrasa au sol, haletante.
Ren tenta de se relever.
Une douleur déchira son bras.
Le Chaos bouillonnait.
Laisse-moi sortir…
Ren ferma les yeux, la tête bourdonnante.
— Non…
Pas encore… pas comme ça… !
Karas s'approcha lentement de lui.
— Résister à ton propre pouvoir…
Tu n'y survivras pas longtemps.
Viens avec moi.
Ou tu mourras ici.
Ren se redressa, titubant.
— Je préfère mourir libre… que vivre enchaîné.
Karas s'arrêta un instant.
Puis il sourit.
— Alors tu ne me laisses pas le choix.
Il leva sa main.
Ren sentit son cœur s'arrêter.
Soudain—
Un cercle argenté apparut sous ses pieds.
Ren fut enveloppé d'une lumière douce.
— Hana… ? souffla-t-il.
Elle tenait sa médaille lunaire dans sa main tremblante, sa barrière activée au maximum.
— Ren… fuis… !
Karas fronça les sourcils.
— Tu ne peux pas le téléporter ! Vous êtes trop faibles, tous les deux !
Hana hurla de toutes ses forces :
— REN ! COURT ! MAINTENANT !
La barrière explosa en un flash.
Ren fut projeté en arrière, traversant une ouverture lumineuse.
Il disparut.
La lumière se dissipa.
Hana s'effondra, épuisée.
Karas resta silencieux quelques secondes.
Puis il sourit, amusé.
— Intéressant.
Très intéressant.
Il posa son pied dans la poussière et observa la marque de la téléportation.
— Où l'as-tu envoyé, petite lune… ?
Son sourire s'élargit encore.
— Peu importe.
Je le retrouverai.
Il tourna le dos au gymnase en ruine.
— Ren.
La prochaine fois… ce sera la dernière.
La nuit se referma derrière lui.
